On pense la question de l'être comme un problème soluble alors qu'elle est un mystère sans cesse renouvelé.
L'autre est le fondement de ma liberté.
Aimer quelqu'un, c'est lui dire : tu ne mourras pas. Le paradis, c'est autrui.
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Mystère vs problème
On doit distinguer le problème du mystère. À chaque problème correspond une solution ; pour peu que l'on puisse
l'examiner, l'objectiver, l'analyser, il peut être résolu. Par contre, même après l'examen minutieux, le mystère ne se prête jamais à une résolution
définitive. Le propre du problème est d'apparaître à l'extérieur de soi, tel un objet sur lequel on peut agir délibérément.
L'être est un mystère qui nous accompagne intérieurement et se conjugue à la réalité extérieure par l'engagement.
Il présente des questions dont nous pressentons l'insolubilité, mais pour lesquelles nous sommes prêts à oeuvrer.
L'erreur serait de considérer le mystère comme un problème.
L'autre est liberté
La question de l'existence du moi ne peut être posée qu'en fonction de l'existence du toi. L'homme n'existe pas
originellement par lui-même, mais dans la participation à autrui.
« On ne peut jamais, vraiment, séparer le sujet de ce qui l'entoure. »
Penser le monde à partir du principe sujet-objet isolerait l'individu dans un cercle, captif de lui-même ;
l'être est fondamentalement intersubjectif. L'autre est le fondement de ma liberté.
L'amour rend immortel
L'amour comporte deux modalités : l'avoir et l'être. La première est dominée par le désir et centrée sur soi-même ;
elle considère l'aimé comme un objet convoité au service de soi.
La seconde est subordonnée à une réalité supérieure ; elle considère l'aimé comme un sujet de dévotion.
La participation à l'être se réalise
dans l'amour qui s'ouvre à l'autre sans réserve et qui renvoie à
Dieu comme le Tu absolu. Parce que la foi est invérifiable, elle reste mystérieuse et transcende toutes les déductions
rationalistes. Elle est la fidélité créatrice. La foi triomphe de l'épreuve (la mort, l'absence) par la fidélité qui est
une grâce.
Aimer un être, c'est lui dire : « Toi, tu ne mourras pas. »
(phrase d'Antoine dans la pièce Le mort de demain, 1931, p. 161)
Après la mort, on continue à vivre dans la mémoire de ceux qui nous aiment.
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