III. La formation d'impression est un processus d'inférence L'impression est constituée d'un ensemble de traits de personnalité attribués à une personne cible :
Les propriétés de l'inférence :
En procédant ainsi le sujet détermine des propriétés stables de la personne qu'il décrit. Pourquoi une inférence : pourquoi se forger une impression stable et cohérente d'autrui ?
Il s'agit donc d'une sorte de procédé de catégorisation des personnes ou de typologie observée. |
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IV. Les relations entre les traits Comme l'impression est la mise en relation entre les traits et leur organisation, il nous faut le mettre en évidence. Un premier phénomène observé est l'effet de Halo [2] 1. L'effet de Halo (Thorndike, 1920) Quand on accorde une caractéristique positive à une personne, on a alors tendance à lui accorder toutes les autres ; cette caractéristique positive se diffuse et se généralise à toute l'impression. Il en est de même pour une caractéristique négative. Clifford, (1975) Tâche : des enseignants doivent décrire des enfants d'après leur photo (jugement d'intelligence, chances de succès à l'école, de l'intérêt probable des parents de chacun des enfants pour leurs activités scolaires).
Résultats : un enfant (jugé) 'beau' est jugé par un enseignant comme plus intelligent, comme ayant plus de chances de succès à l'école comme ayant des parents investis dans ses activités scolaires par rapport à un enfant (jugé) 'laid'. Aspect simplificateur de fonctionner avec les gens. Expérience de Brunswick (1956) Objectifs de l'auteur :
Procédure :
Il n'y a pas de lien entre les mesures objectives de l'intelligence et de l'amabilité. Dans l'ensemble, une personne jugée intelligente est estimée très aimable (mesure subjective). Cette surestimation produit une distorsion dans la perception d'autrui, c'est l'effet Halo. Dans la réalité, il n'y a pas de correspondance entre ce que nous percevons et ce que nous jugeons. 2. L'erreur logique de Guilford, 1936 C'est une inférence d'un trait à partir d'un autre trait. Une personne pense que deux caractéristiques vont naturellement ensemble ou au contraire, s'excluent mutuellement. Ex. : un sujet pense qu'une belle femme n'est pas intelligence, ou une autre personne pense que les femmes belles sont intelligentes. Les deux individus commettent une erreur logique. |
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Les sources : théorie de la forme (Wertheimer, Kölher, Koffa, Heider, Lewin...) Les principes de la psychologie de la forme :
Quelques principes :
Nous fonctionnons sur la base de théories, de structures, de schémas et leurs propriétés sont de donner forme aux informations. 3 buts :
1er but :
2e but :
L'impression est organisée comme un tout, un système. Si un élément central de ce système change, alors toute l'impression est réorganisée, modifiée. 3e but :
Soit la liste de traits : « intelligent, travailleur, impulsif, critique, entêté, envieux. »
L'effet de contexte : Selon Asch (1946), les traits changent de signification (meaning change hypothesis) selon le contexte où ils sont présentés. Un trait est perçu plus positivement quand la personne est présentée comme positive que lorsqu'elle est présentée comme négative.
Liste de traits : « prévenant, amical et rusé -> rusé = ingénieux. » Le trait rusé n'a pas la même signification dans ces deux listes. Pour résumer L'ensemble des traits qui caractérise une personne forme un tout organisé dans lequel la signification de chaque trait dépend de tous les autres. Par ailleurs, Asch précise que tous les traits n'ont pas la même importance et que certaines caractéristiques sont perçues comme plus centrales et plus déterminantes que d'autres dont on peut dire qu'elles sont périphériques. Face à un ensemble d'éléments, nous sommes rapides à saisir les renseignements centraux et c'est à partir de ces renseignements que nous nous construisons une impression globale d'autrui. En fait, plus qu'une impression, Asch parle d'une véritable théorie sur la personne jugée et le problème est que cette théorie mise en place sera très difficile à bouleverser. Asch précise que nous traitons les informations relatives à autrui en direct et au fur et à mesure. Ceci pose problème puisqu'on n'attend pas pour porter des jugements, de tout savoir sur autrui. Asch a aussi mis en évidence un effet de primauté c'est-à-dire que l'information reçue en premier déterminerait plus l'impression que l'on a d'autrui que l'information reçue en dernier. Une personne décrite comme « intelligente, travailleuse, critique, impulsive et envieuse », l'impression est plutôt positive. Alors que si on fait la description en sens inverse, l'impression est négative. |
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VI. Le modèle de Anderson (1965, 1974, 1981) Les gens se livrent à une algèbre cognitive et combinent des informations à valences différentes (positives et négatives). Les gens fondent leurs impressions sur des faits et non sur des théories. Objectifs : connaître l'algèbre mentale que les gens utilisent quand ils doivent intégrer une information. Hypothèse : chaque trait a un score immuable, une valeur qui lui est propre, un degré de favorabilité ou de possibilité qui lui est unique, spécifique, quel que soit le contexte. L'impression finale dépend de chaque trait considéré individuellement et de son poids. La présence d'autres traits ne change pas la signification ni le poids d'autres traits. 1. L'élaboration des cotations dans le modèle de Anderson et la validation du modèle
Objectif : mettre à jour l'algèbre des sujets qui guide leurs jugements de sympathie. Deux solutions possibles : le modèle additif et le modèle par moyenne. Les notions de pondération et d'impression initiale sont introduites dans son modèle pour rendre compte de l'effet de primauté (Asch) :
Impression finale : f0p0+f1p1+...fnpn / p0+p1+...pn
f0 = impression initiale (par exemple : 2 - on est plus favorable au départ) Si nous faisons le calcul pour la personne A et que la pondération se porte sur l'amitié, nous obtenons le résultat suivant : Impression finale = (2*0,2)+(3*10)+(3*10)+(3*1) / 0,2+10+10+1 = 2,93 Si nous faisons le même calcul pour la personne B et que les pondérations sont identiques nous obtenons le résultat suivant : Impression finale = (2*0,2)+(10*10)+(-2*1) / 0,2+10+1 = 8,78 La personne B sera préférée à la personne A. 2. L'effet de primauté : modèle de Asch ou de Anderson ? Anderson : l'effet de primauté résulte de la baisse d'attention des sujets. Asch : le premier trait de personnalité fourni sert de point d'ancrage. En fait, les listes de traits que propose Asch ne comportent que 6 traits. 3. Que se passe-t-il vraiment dans l'expérience de Anderson ?
4. Expérience de Belmore (1987) Objectif : rendre compte du déficit attentionnel et de l'effet de primauté dans la lecture des portraits. L'attention est d'abord définie comme « la quantité de traitement d'une information stimulus » (1987).
Résultats :
5. Expérience de Tetloch (1983) On peut annuler l'effet de primauté en impliquant les sujets à la tâche. Expérience : Procédure : une partie des sujets doit justifier ses conclusions (son impression envers autrui). L'autre partie n'a pas à justifier ses conclusions. Tâche : lire la description d'un meurtre. La moitié des informations suggère la culpabilité de la cible et la seconde moitié, son innocence. Hypothèse : les sujets qui devront se justifier seront moins sensibles à l'effet de primauté que l'autre groupe de sujets. Résultats :
6. Comparaison des modèles de Asch et de Anderson Deux conceptions et deux approches différentes de la perception sociale.
Problème : Comment les structures sont organisées. Comment les structures sont sollicitées dans la perception sociale.
Problème : Comment l'information est-elle évaluée — trouver la loi (algébrique) d'intégration des informations. 7. Qu'apportent de plus les TIP (Théories Implicites de la Personnalité) au modèle de Asch ? Traits-stimuli => impression générale => inférences de traits particuliers (fig. a)
Traits-stimuli => TIP => Impression générale Schématisation du modèle de Asch (fig. a) et du modèle de Bruner et Taguiri. Fig. a = l'impression générale se fait en ligne.
Fig. b = une théorie implicite sur l'organisation des traits entre eux préexiste |
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VII. Théories Implicites de Personnalités (Bruner et Tagiuri, 1954) En étudiant la perception sociale, nous avons vu que les gens arrivent à partir de quelques indices à se faire une idée générale de la personne, notamment avec Asch, on a parlé de la formation d'une impression globale grâce aux inférences concernant les traits décrits. Pour Bruner et Tagiuri, si nous donnons une certaine cohérence aux observations et aux informations qu'on a pu avoir de la personne, c'est que nous avons des connaissances préalables sur la personnalité d'autrui et c'est ce qu'on appelle les Théories Implicites de Personnalités. 1. Définition des Théories Implicites de Personnalités (Leyens, 1983) Théories Implicites de Personnalités : Théories naïves que chaque individu a de la personnalité et qui rendent compte du fait que les gens considèrent que certains traits de personnalité vont généralement ensemble et d'autres non. Croyance générale à propos de la fréquence d'un trait, à propos de sa variabilité et de sa liaison avec d'autres traits. Ces théories n'ont aucun critère objectif de validité. C'est un répertoire de traits qu'on utilise pour faire la description psychologique d'autrui. Quand on voit qu'une personne possède telle ou telle caractéristique, on va inférer la présence ou l'absence d'autres traits de caractère. Si on parle de théories implicites c'est parce qu'elles sont naïves, c'est-à-dire que les sujets qui les utilisent ne savent pas vraiment les expliquer et cela repose sur la sagesse populaire. Cela ne veut pas dire que c'est inconscient.
2. Les Théories Implicites de Personnalités sont partagées socialement Il y a beaucoup de différences interindividuelles et interculturelles dans les TIP que possèdent les personnes, mais il y a une structuration que l'on retrouve très fréquemment : le Big Five (Zebrowitz, 1990 ; Norman, 1963). Dans de nombreuses recherches les mêmes TIP reviennent toujours : une classification des traits de personnalité en 5 catégories indépendantes (observé en Philippines, au Japon, à Hong Kong, Taïwan, en République de Chine et aux É.-U.). Les dimensions relevées sont celles de : 1. l'amabilité — Ex. : « je suis sympathique » 2. la stabilité émotionnelle — Ex. : « je change souvent d'humeur » 3. la culture — Ex. : « je suis plutôt intellectuelle » 4. consciensosité — Ex. : « j'aime le travail bien fait »
5.
introversion/extraversion — Ex. : « j'apprécie la solitude » La structure en « big five » :
3. Théories Implicites de Personnalités et corrélations illusoires Définition de Chapman et Chapman (1967) des corrélations illusoires : tendance de l'esprit à exagérer la fréquence des liens entre les événements en présence. Chapman et Chapman (1967, 1969) ont présenté à des psychologues et à des étudiants en psychologie des cas de patients hypothétiques présentant des problématiques diverses. Chaque cas était accompagné d'un diagnostic (paranoïaque, problème d'impuissance, etc.) et du dessin du bonhomme, censé avoir été fait par le patient. Les résultats ont mis en évidence que les sujets surestimaient la fréquence des signes présents dans le dessin en fonction de la problématique du patient. Ainsi, lorsqu'ils jugeaient un paranoïaque, ils ont trouvé davantage de gros yeux dans les dessins, et davantage de larges épaules et de musculature développée quand le patient était préoccupé par sa masculinité. Il semble bien que nous préférions les explications qui confirment nos croyances. L'inconvénient est que, bien souvent, le recours à ces théories naïves renforce et entretien nos stéréotypes => racisme, sexisme. 4. Un prolongement des travaux sur les Théories Implicites de Personnalités Cantor et Mischel (1979) — Solso et Mc Carthy (1981) TIP : processus général de catégorisation, on a une représentation mentale générale d'autrui. On peut penser alors que :
Objectifs : établir des hiérarchies ou des taxonomies de types de personnes.
Expérience de Solso et Mc Carthy (1981) : mémorisation des visages, construction de portraits-robots. Matériel : 4 portraits-robots et pour chacun d'eux 3 visages dérivés supplémentaires (soit ressemblants à 75%, soit ressemblants à 50%, soit ressemblants à 25%, soit pas du tout ressemblants). Tâche : 1. Mémoriser les 4 portraits et les images dérivées qui sont projetées toutes les 30 secs. 2. Deuxième projection des 4 portraits, mais avec de nouvelles images dérivées. Les sujets doivent dire s'ils ont déjà vu cette personne et donner leur certitude sur une échelle. Conclusion :
5. La construction des Théories Implicites de Personnalités Les TIP sont-elles acquises au fur et à mesure des contacts interpersonnels et des expériences sociales, et à partir des observations empiriques ? Les TIP trouvent leur origine dans le fonctionnement de l'univers cognitif des sujets :
6. L'utilisation des indices physiques Felman (1971)
=>
Felman Sh, Le scandale du corps parlant, Paris, Seuil, 1980. Cas 1.
Felman classe les étudiants sortis de son université en deux catégories :
Les grands ont des salaires supérieurs de 12% à ceux des petits. Cas 2. 140 conseillers professionnels. Tâche : choisir un candidat parmi deux pour travailler ; soit le candidat fait 1,80m, soit il fait 1,55m.
Résultats : dans 72% des cas le plus grand des deux est choisi. Cas 3. Wilson, 1968 : quelqu'un de compétent est perçu comme plus grand qu'il n'est vraiment par rapport à quelqu'un de moins compétent que lui. Conclusion : on juge les gens sur leur mine.
Voici quelques stratégies de résolution de l'incohérence entre les traits (Asch et Zuichier, 1984) :
=> On rationalise l'inconsistance. |
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[1]
Texte extrait de la page : Bibliographie BOURDIEU P, PASSERON P, Les héritiers : les étudiants et la culture, Éditions de Minuit, 1964. BROPHY J, GOOD T, Teacher-student relationships : Causes and consequences, New York, 1974. DE LA HAYE A-M, La catégorisation des personnes, PUG, 1998. EAGLY A-H, Sex differences in social behavior : A social-role interpretation, 1987. FISKE S-T, TAYLOR S-E, Social Cognition, New York, 1991. JONES R-L, Black adolescents, Berkeley, 1989. LIPPMANN W, Public opinion, New York, 1922. PEDHAZUR E-J, Multiple regression in behavioral research, New York, 1982. ROSENTHAL R, JACOBSON L, Pygmalion in the classroom : Teacher expectation and student intellectual development, New York, 1968. MacRAE N, STANGOR C, HEWSTONE M, Stereotypes and stereotyping, New York, Guildford Press, 1996. [2] À distinguer l'effet de Halo de l'effet Pygmalion. |
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