Textes références

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13 novembre 2016

 

[1]

Paradoxe de l'égalité en démocratie

 

Je ne crains pas le suffrage universel  ; les gens voteront comme on le leur dira.

Tocqueville

* * *

Le fait que le pouvoir soit divisé entre tous les citoyens assure l'égalité de tous, mais rend le vote individuel de chaque citoyen insignifiant. Si un groupe est composé de cinq personnes et qu'une décision est prise démocratiquement par les membres du groupe, il est justifié d'affirmer que chacun d'eux possède une part substantielle du pouvoir. Quand un groupe comprend des millions de personnes, comme c'est le cas dans les démocraties modernes, le poids de chaque vote est presque nul. Un vote individuel ne représentera aucune différence significative dans l'issue finale de la consultation. Comme le soulignait Rousseau, « plus l'État s'agrandit, plus la liberté diminue ». Le problème est qu'en divisant également le vote entre tous pour partager le pouvoir de façon égale, on en vient à retirer à chacun tout pouvoir réel. Le pouvoir de chaque individu est égal au pouvoir des autres, mais ça ne l'avance pas beaucoup, puisque ce pouvoir est dissout dans la masse. Nouveau paradoxe donc : l'égalité de pouvoir débouche sur l'absence de pouvoir. Dans le langage de la rationalité économique, nous parlerons d'un bénéfice nul.

Et qu'en coûte-t-il en contrepartie au citoyen qui veut participer activement au processus démocratique ? Il lui en coûte tout le temps et l'énergie nécessaires pour s'informer, suivre les débats publics, bien connaître les candidats et les programmes politiques de chaque parti, participer à des activités de consultation ou de représentations. Bref, il lui en coûte beaucoup trop pour le pouvoir quasiment nul que lui octroie le système démocratique. On en arrive ainsi à la conclusion que la stratégie la plus rationnelle, pour la plupart des citoyens, est de rester ignorant en matière de politique, et même de s'abstenir de voter et d'abandonner à ceux qui votent la responsabilité du fonctionnement de la démocratie. C'est ce que la théorie du choix rationnel appelle la « rationalité de l'ignorance ».

[1] Texte dont l'auteur m'échappe (bienvenue à qui pourrait me renseigner) utilisé à l'hiver 2014 pour le cours Philosophie et rationalité par un professeur de philo au cégep. (Il pourrait s'agir de Tocqueville ou de Jean-Paul Laffitte, mais aussi de l'enseignant lui-même.)

Philo5
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