par
(Léo Ferré – Tu ne dis jamais rien)
J'ai
les yeux toujours tournés vers l'extérieur et je me projette sur ce monde
irréductible que je voudrais bien faire à mon image. Je n'arrive pas à
m'accommoder des distorsions que ce monde me renvoie sur ce que je voudrais
voir. Je voudrais que partout soit animé des valeurs auxquelles je consens. Ce
serait le monde parfait. Ma vie entière passe à essayer de le synchroniser à ce
que je pense de lui, à ce que je pense qu'il devrait être.
Dans
les fenêtres de mes yeux je vois les autres comme ma propre image et tant
qu'ils ne contrastent pas trop avec cette illusion, je reste tranquille. Mais
ils me réveillent, quand ils me disent trop fort « toi n'est pas moi » ; je me sens agressé, projeté hors de
moi, nié. Mais c'est aussi ce qui me fait vivre. Je suis tellement en paix avec
ceux qui partagent mon point de vue que je ne leur téléphone jamais. Les autres
m'intéressent ; ils me gardent en vie.
M'attarder à changer mes désirs plutôt qu'à changer l'ordre des
choses.
(René
Descartes)
Mais
voilà que Descartes
change la donne. Je devrais m'accorder sur le monde et non le mettre à mon
image. Bon, d'accord, je change d'objectif. Et une fois que j'aurai consenti
pleinement à ce monde qu'en sera-t-il des nouvelles discordances qui naîtront
de ceux qui ne penseront pas comme moi-Descartes? Peut-on jamais guérir d'avoir
été programmé chrétien? Peut-on jamais remplacer le BIOS [1] de la culture maternelle?
Je
vois le monde un peu comme on voit l'incroyable...
[1] BIOS (Basic Input Output System) : Programme fondamental sans lequel aucun ordinateur ne pourrait fonctionner. Déclaration de base de ses conditions d'opération ; programme initial qui détermine ses possibilités d'échange avec le monde.