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Pour ma part, j'aime bien penser que Jésus était un philosophe nommé Ieschoua,
vivant à Nazareth et ayant pratiqué le métier de charpentier appris de son père Joseph.
Il était doté d'une capacité de réflexion et d'humanité hors du commun. Il a introduit
dans la pensée occidentale une notion révolutionnaire : le pardon.
Il montre
que c'est la seule manière de briser le cycle funeste de la haine.
Au contraire, la punition, la vengeance et la répression la prolongent indéfiniment.
À la loi du talion, il oppose de rendre le bien pour le mal.
Il suggère carrément de mettre notre nature humaine de côté et de choisir volontairement, librement et activement,
non seulement de ne pas nous venger, mais au contraire d'aimer l'agresseur.
Cette perversion volontaire brise l'escalade de la vendetta et impose le triomphe définitif de la paix.
Qu'en est-il de ce programme après 2 000 ans ?
Hé bien, il semble que la chrétienté soit une philosophie si puissante qu'elle a su s'imposer malgré
le fait qu'elle ait traversé des siècles d'horreurs, de conquêtes et d'Inquisition.
Malgré la dénonciation générale des abus auxquels elle a conduit, elle tire sa force du sacrifice librement
consenti dont l'image choc est celle du crucifix : victime innocente, mais volontaire.
En effet, rien de plus troublant pour l'esprit que de voir un homme à qui on ne peut rien reprocher,
un homme bon et généreux, cloué à la croix, et gigotant jusqu'au bout de son sang.
Les institutions qui ont diffusé le bouleversant message ont parfois sombré dans l'abus de confiance,
la perversion, la fausse représentation ou la mystification pour ensuite être rejetées par les fidèles désillusionnés.
Mais le message de cette philosophie et l'exemple de son initiateur parlent si fort qu'il renaît chaque fois sous une
nouvelle forme après être tombé quelque temps en discrédit. Comme
l'a souligné, Être chrétien est impossible, et pourtant, nous n'avons pas le choix de vivre autrement qu'en chrétien.
Jésus personnifie Dieu comme un père idéal dont la bonté serait le principal attribut.
Bien sûr, au moment de la mort, coincés dans des souffrances insupportables,
il est difficile de croire en la bonté d'un être qui nous aurait créé.
Comment voir dans cet horrible instant, la manifestation de la bonté d'un Dieu aimant ?
Mais gageons que celui qui arrive à se convaincre de cette chimère, meurt moins angoissé que l'athée
qui se destine au néant.
Bref, peu importe la réalité, le sentiment de sérénité provoqué par la foi explique
les conversions de dernière
minute .
Quel que soient les intentions véritables du « bourreau »,
n'est-il pas apaisant de croire qu'elles sont guidées par une bonté fondamentale ?
Ceux qui pratiquent le sado-masochisme en savent quelque chose :
seule l'intention que l'on prête au bourreau suffit à faire jouir ou souffrir.
Dans les
,
en dit long sur cette apaisante perversion de l'âme que procure la foi chrétienne en baume contre
le bourreau cruel et inévitable.
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