Bienvenue au 67e

« Philo sans fumée »

de décembre 2005

Bonjour à tous! 

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1.     NOUVELLES DE PHILO5 :

*     Textes des néoplatoniciens Plotin, Augustin, Proclus et Boèce

*     Pascal Jouxtel nous introduit à la mémétique

*     Nouvel instrument de musique : la TRITARE

2.     SUJET DU MOIS : Changeons l'avenir

3.     PHILOSOPHE DU MOIS : GROTIUS

4.     LES QUESTIONS PHILOSOPHIQUES : SOMMES-NOUS LIBRES?

5.     QUELQUES LIVRES REMARQUABLES : La très grande bibliothèque : 50 idées, 200livres / Les protestants / La foi, ou la nostalgie de l'admirable.

6.     MAGAZINE : Science et Vie cherche Dieu

7.     RIRE ET S'ATTENDRIR : IDÉE DÉPLAISANTE

8.     PENSÉES DU MOIS : GOLDA MEIR et PIERRE LÉVY

9.     POUR LES NOUVEAUX PARTICIPANTS... : Écrivez nous pour participer...

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1 – N O U V E L L E S   D E P H I L O 5

Textes originaux des philosophes

* Les philosophes néoplatoniciens Plotin, Augustin, Proclus et Boèce on maintenant chacun un texte sur philo5. Malheureusement, aucun texte original du fondateur, Ammonius Saccas, ne nous est parvenu.

Par contre, pour Plotin, l'extrait l'Un vient de la main du maître (si on néglige le fait que c'est une traduction). Ce texte peut sembler obscur à la première lecture mais il faut comprendre qu'il a été formulé dans le contexte d'une période et d'une région (Alexandrie) où les croyances se multipliaient. Le concept unificateur de l'Un apportait une vision universaliste essentielle.

Le Foi, cogito et temps d'Augustin nous révèle un philosophe soucieux de concilier la raison avec la foi. Il fournira aux philosophes à venir un ancrage décisif pour l'orientation à venir de la philosophie occidentale. Si Augustin est resté un philosophe sympathique jusqu'à aujourd'hui, c'est qu'il nous livre à travers ses réflexions des sentiments auxquels il nous est encore possible de s'identifier.

Dans Matière dualité et unité, Proclus réconcilie la matière et l'esprit ainsi que la multiplicité et l'unité. C'est la forme la plus accomplie que devait trouver le néoplatonisme.

Que feriez-vous entre deux séances de torture si on vous avait injustement condamné à mort? Boèce vit cette intolérable situation et a trouvé un moyen de la supporter que vous découvrirez dans Consolation de la Philosophie.

Pascal Jouxtel nous introduit à la mémétique

* La mémétique est une philosophie si jeune – trente ans à peine – que très peu de professionnels de la philosophie en connaissent le terme. Pascal Jouxtel, président de la Société francophone de mémétique, vient de lancer son livre Comment les systèmes pondent, une introduction à la mémétique. Dans cette nouvelle philosophie, introduite par l'États-unien Richard Dawkins, l'individu disparaît pour laisser la place à des entités – les mèmes – qui nous habitent et nous utilisent pour se reproduire à la manière des gènes. Ceux-ci sont autonomes et utilisent notre esprit pour se dupliquer à notre insu. Ce nouveau concept semble nous déresponsabiliser pour ce que nous sommes. Tout comme le Darwinisme a rendu l'idée de Dieu inutile, le Dawkinisme fait disparaître le libre arbitre. Je sens qu'il va nous falloir une forte dose de Jean-Paul Sartre pour recouvrir notre liberté. Mais la mémétique est une philosophie si cohérente qu'elle en est inquiétante. Peut-être est-ce une des principales raisons pour laquelle elle a de la difficulté à se faire reconnaître. Souriant paradoxe que la mémétique soit un concept qui, mémétiquement, arrive mal à se dupliquer dans l'esprit des populations. (Le miroir peut-il se voir lui-même?) Merci à monsieur Jouxtel de mettre à la disposition des francophones un ouvrage qui nous ouvre la perspective vers une passionnante conception de l'être humain. J'y reviendrai après l'avoir lu.

Nouvel instrument de musique : la TRITARE

* Le Salon de la musique de Montréal m'a fait découvrir un nouvel instrument de musique fascinant : la tritare. Vous pouvez en écouter quelques morceaux sur le site de son génial inventeur et artisan, monsieur Claude Gauthier. L'instrument à trois manches donne des possibilités impressionnantes. À chaque extrémité du Y que forme chacune des six cordes tendues par les trois manches, on a disposé des capteurs électriques. Ceci permet de doser la proportion d'harmoniques selon l'inspiration du musicien. Le son me rappelle un peu la cithare en ce sens que les harmoniques prennent une importance parfois aussi grande que les notes fondamentales. Après avoir pincé la corde, la vibration de celle-ci se développe en une progression d'harmonies qui réjouit l'oreille. Cet instrument nouveau appelle de nouveaux compositeurs. En effet, sa sonorité est si singulière qu'il faudra renoncer à y jouer des airs composés pour d'autres instruments. La tritare nous ouvre la porte vers de nouveaux horizons musicaux.

 

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2 S U J E T   D U   M O I S   :

CHANGEONS L'AVENIR

Bien sûr, l'avenir est la seule chose sur laquelle nous ayons du pouvoir. Quand il s'agit d'écologie, nous savons tous qu'il est impératif d'agir maintenant ; les compagnies qui fabriquent nos véhicules plus que tout autres. Cependant, cet état de fait peut parfois les mener à plonger dans de curieux paradoxes. L'affiche de la Campagne Toyota « Changeons l'avenir » m'a conduit à cette réflexion.

 

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3 L E   P H I L O S O P H E   D U   M O I S   :

Grotius

Grotius est un philosophe du 17e siècle qui a réfléchi sur le droit. Si, traditionnellement, la loi s'inspirait des textes religieux, la renaissance, accompagnée de la découverte de nouveaux mondes, a vu naître une époque où, voulant prendre sa destinée en main, l'humain a dû s'interroger sur les notions fondamentales de droit. La superstition religieuse cédera graduellement la place à la rationalité. Grotius a fondé le droit international en élaborant une audacieuse notion de Droit Naturel où même Dieu « ne peut rien y changer ». L'Être Suprême s'identifiera désormais davantage à la raison qu'à la foi. Il n'était pas encore question à cette époque de nier l'existence de Dieu, loin de là. Mais Dieu devrait désormais, pour ainsi dire, arrêter de faire de la magie en contournant ses propres lois naturelles. Dieu est tout puissant certes, mais pas au point que deux et deux fassent cinq en même temps que deux et deux font quatre. Grotius lançait à Dieu, en quelque sorte, un appel à être raisonnable. Quelle audace! Il ouvre même la porte à l'athéisme en déclarant que, Dieu ou pas, les Lois Naturelles s'appliquent. Du coup, le mécréant pouvait être réhabilité dans sa morale en autant qu'il reconnaisse des lois raisonnables : les lois naturelles. Nous sortions d'une époque où tout incroyant était nécessairement un ennemi à abattre pour entrer dans une époque où l'étranger, malgré son ignorance du Dieu chrétien pouvait être un ami potentiel. On dit de Grotius qu'il est le « Père du droit des gens ».

 

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4 – L E S   Q U E S T I O N S   P H I L O S O P H I Q U E S

Dans la série Les grandes questions des philosophes, nous abordons ce mois-ci la 5e question sur laquelle les philosophes attirent notre attention : Dieu existe-t-il? Qu'en pensez-vous? Suivez le lien et, en vous inspirant des différentes réponses que vous proposent les philosophes, essayez de m'expliquer votre point de vue... J'attends vos réflexions.

 

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5 – Q U E L Q U E S   L I V R E S R E M A R Q U A B L E S

 

La très grande bibliothèque 50 idées, 200 livres qui ont frappé le monde, Actuel

Éditions de la Martinière © 2005

Si vous n'avez pas le temps de lire, courez vite l'acheter. Actuel est un magazine culturel underground lancé en 1970 par Jean-François Bizot et Michel-Antoine Burnier. Trente quatre lecteurs ont analysé deux cent livres et nous en livrent une synthèse en 50 textes. Abondamment illustré, chaque texte ne dépasse pas trois pages et s'inspire de plusieurs livres qui traitent d'un même thème. Dans un voyage idéologique s'étalant sur les soixante dernières années, on nous propose – depuis la fin de la 2e Guerre mondiale jusqu'à aujourd'hui – de méditer sur les grands enjeux qui ont transformé notre société. Avant de produire les zombies de la consommation que nous sommes devenus, la révolution de mai 68 avait généré le goût de la réflexion. À cet époque, Actuel était à la France un peu ce que Mainmise était au Québec.

Successivement, on passe en revue l'horreur nazie, la liberté États-unienne, le communisme et Sartre, le féminisme de Simone de Beauvoir et celui de Brigitte Bardot, le culte de la nouveauté, Le Gène égoïste de Dawkins, les médias de Marshall MacLuhan, la théorie des complots, l'art-automutilation, le structuralisme, la société du spectacle avec Guy Debord, l'homosexualité, Alan Watts et l'Orient, l'écologie, le Goulag, le feedback et les paradoxes, l'Histoire que font les historiens, la Trash Culture, l'architecture, le droit d'ingérence, le Nouvel Âge, la théorie du chaos, le libéralisme et la mondialisation, les relations publiques, l'identité culturelle, la révolution informatique, l'Islam radical, la fin de l'Histoire, la civilisation du mal, le KGB, le genre fait pour jouir, le clonage industriel et commercial, la résurgence animiste, le déraillement capitaliste, le retour de Dieu et j'en passe. Rien de moins qu'un festin philosophique écrit par des gens qui n'ont pas peur de penser et qui nous présentent dans un langage clair les paradoxes qui nous habitent. Le Connais-toi toi-même de Socrate n'a jamais été mieux servi.

 

Les protestants, Claudette Marquet

Les essentiels Milan #121 © 1998

Les protestants sont au Canada des groupes si paisibles et si discrets que, je dois l'avouer, avant de livre cet opuscule, je n'aurais pas su dire véritablement en quoi leur religion se distingue. Ils ont bien quelques adeptes qui nous recommandent parfois de lire la Bible mais sans plus. Je savais que le fondateur du protestantisme, Luther, s'était insurgé contre le marchandage de Dieu auquel les catholiques se livraient au début du 16e siècle pour recueillir les fonds nécessaire à bâtir la Cité du Vatican. Je savais aussi que les protestants refusent de passer par des saints pour accéder à Dieu et qu'ils s'abstiennent d'illustrer la liturgie d'images ou de statues, mais l'essence même de cette religion m'échappait.

Claudette Marquet nous fait comprendre très nettement la différence entre un catholique et un protestant. Le catholique pense pouvoir influencer Dieu par des prières et des sacrifices. Il pense que ce genre de dévotion plaît à Dieu et le dispose à accorder des faveurs. Ainsi, il prie dans une intention mercantile ; il cherche à gagner son ciel par les prières comme il cherche à gagner sa vie par le travail. Pour le protestant, il en va tout autrement. Le protestant pense que Dieu accorde sa grâce à qui il veut (à tous) et qu'il n'est sensible à aucun marchandage. Bien plus, ils pensent que la prière ne peut servir à gagner le paradis puisque seul Dieu décide qui sera sauvé et qui ne le sera pas. Si le protestant prie, ce n'est pas pour demander mais pour célébrer les bienfaits que Dieu lui accorde. En fait, celui-ci est un croyant satisfait et reconnaissant de la vie que Dieu lui donne.

Le protestant voit le catholique comme un perpétuel insatisfait qui en veut toujours plus comme si ses prières disaient à Dieu qu'il n'en fait pas assez. (Ceci rappelle Jim Morrison avec son You can't petition the Lord with prayer.) Le protestant croit en quelque sorte que Dieu nous prédestine alors que le catholique pense être libre d'influencer le cours des choses par ses requêtes. L'un croit que le Père céleste est bon et généreux, l'autre croit qu'il est juste et équitable. Deux positions inconciliables.

Les Protestants ont formé diverses sectes : luthériens, calvinistes, anglicans, baptistes, méthodistes, pentecôtistes, congrégationalistes, etc. Autant de manières de célébrer leur foi, mais tous unis dans les grandes affirmations des réformateurs : à Dieu seul la gloire, la foi seule, la grâce seule. Ils proclament le sacerdoce universel : tous les fidèles, laïcs ou pasteurs, sont à égalité de responsabilité et de témoignage. Ils récusent l'autorité du pape comme chef de la chrétienté.

 

La foi, ou la nostalgie de l'admirable, Bertrand Vergely

Albin Michel © 2004

La première leçon d'un cours de philosophie consiste à rappeler que les philosophes ne sont pas là pour croire, ni pour faire croire, mais pour pen­ser, et faire penser. Ce qui se comprend. Croire, n'est-ce pas adhérer par principe ? Et se lier ainsi, n'est-ce pas renoncer à penser, à juger, à criti­quer ? Celui qui croit cesse d'examiner. Il adhère. Il ne remet pas en cause. Le philosophe se refuse à croire ainsi. Il lui faut examiner. Car, à ses yeux, il est trop facile de croire. Qui n'a pas rêvé de pou­voir s'abandonner les yeux fermés à un idéal que l'on n'aurait plus à devoir penser, en suivant un maître en qui l'on pourrait avoir toute confiance? Devoir faire preuve de vigilance a quelque chose d'usant. Il arrive que l'on ait envie de ne plus lut­ter, afin de goûter les fruits de l'insouciance. On est alors plus fou que sage, en laissant choir la pen­sée qui fait l'honneur de l'humanité.» (lire la suite...) (Merci à Dominique Giraudet pour la référence)

 

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6 – M A G A Z I N E

 

« La science cherche Dieu »

Pourquoi Dieu ne disparaîtra jamais, Science et vie, No.1055 d'août 2005

(Dossier de 4 articles en page 46 à 66)

Les neurosciences sont sur la piste d'une « molécule de la foi ». La propension à voir le monde comme habité par le divin (la « religiosité ») dépend effectivement du taux de sérotonine. [...] Ainsi donc, un taux élevé de sérotonine dans le cerveau ac­croîtrait le degré de religiosité! [...] Et la dimension troublante du résul­tat obtenu par les chercheurs sué­dois apparaît dès lors pleinement lors­qu'on apprend que, parmi les 25 as­pects de la personnalité des volontaires évalués par le TCI (Temperament and Character Inventory) [Inventaire du tempérament et du caractère], la re­ligiosité se révéla être... le seul et unique paramètre corrélé avec la densité des récepteurs 5HT1A! La conséquence de cette découverte peut sembler sacrilège. Car pour Jacqueline Borg, une conclusion s'im­pose désormais : « Le système de pro­duction de la sérotonine pourrait bien être vu comme l'une des phases biolo­giques de la croyance religieuse, même si le résultat de l'étude doit encore être précisé avec des travaux menés sur un panel de volontaires plus large ». Dieu serait-il une substance chimique? (Lire la suite...)

 

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7 – R I R E E T   S ' A T T E N D R I R

 

Greg, Achille Talon : Idée déplaisante

 

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8 – P E N S É E S   D U   M O I S

  

Comme l'inconscient de Freud, le péché originel de Saint Augustin fait de tout être bien portant un malade qui s'ignore. Ça crée de l'emploi pour le clergé-médecin : une clientèle à sauver.

F.B. (Citation No. 281)

  

Boèce nous dit où va l'âme de l'homme aimant quand son bourreau le tourmente.

.

F.B. (Citation No.251)

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9 P O U R   L E S   N O U V E A U X   P A R T I C I P A N T S

 « Philo sans fumée » est le bulletin mensuel de Philo5.com mais c'est aussi une rencontre mensuelle organisée le premier vendredi de chaque mois. Vous êtes cordialement invité à y participer. Pour être invité, écrivez-nous.

Si vous n'habitez pas Montréal et que nos rencontres vous intéressent, vous pouvez encore nous écrire vos réflexions. Elles seront communiquées au groupe et viendront enrichir notre échange. Qu'elle soit épistolaire ou en personne, nous vous remercions de votre présence.

 

François Brooks

 

 www.philo5.com

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