Bienvenue au 66e
« Philo
sans fumée »
de novembre
2005
Bonjour à tous!
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1.
NOUVELLES DE PHILO5 :
Textes des sceptiques Pyrrhon d'Élis et de Sextus Empiricus
Depardieu lira saint Augustin à Montréal : Comment être
invité?
Deux
nouveaux philosophes s'ajoutent à Philo5 : Gobineau et Hitler
2.
SUJET DU MOIS : La HAINE
3.
PHILOSOPHE DU MOIS :
MONTAIGNE
4.
LES QUESTIONS
PHILOSOPHIQUES : SOMMES-NOUS LIBRES?
5.
QUELQUES LIVRES REMARQUABLES : Les
philosophes grecs / Le roman d'Aurore, la petite persécutée / Les hommes
protégés
6.
RIRE ET S'ATTENDRIR :
C'EST BIEN LAID QUE LES RAGES
7.
PENSÉES DU MOIS : GOLDA MEIR et PIERRE LÉVY
8.
POUR LES NOUVEAUX
PARTICIPANTS... : Écrivez nous pour participer...
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Les philosophes sceptiques Pyrrhon
d'Élis et Sextus
Empiricus on maintenant chacun un texte sur philo5. Malheureusement, aucun
texte original de Pyrrhon d'Élis n'a été retrouvé, comme pour plusieurs autres
philosophes grecs, il faut se contenter des références les plus fiables que
l'on a pu trouver. Par contre, pour Sextus Empiricus l'extrait vient de la main
du maître (si on néglige le fait que c'est une traduction). Le Ont
dit sur Pyrrhon d'Élis nous révèle un scepticisme qui est
loin des sceptiques de notre époque qui, pour la plupart, ont une foi si
aveugle en leur « scepticisme » qu'il ne se rendent pas compte qu'ils
l'ont élevé au rang du dogme. Pyrrhon d'Élis est d'un scepticisme si
intellectuellement honnête qu'il accepte volontiers de douter de son propre
scepticisme jusqu'à l'évacuer complètement : d'où paradoxe troublant et
fascinant, puisque, que reste-t-il au sceptique qui a tout évacué sinon la foi?
Les Cinq
tropes pour l'épochè sont une démonstration magistrale
extrêmement convaincante qui force l'adhésion. Pourtant, il y a quand même une
faiblesse qui a pour effet de renforcer la thèse des croyants plus que tout
dogme, quel qu'il soit. Sauriez vous la trouver?
Je vous avais annoncé dans le précédent
bulletin que mercredi le 23 novembre, Gérard Depardieu fera la lecture de
textes choisis de saint Augustin à la basilique Notre-Dame de Montréal. Voici
comment on peut être invité. Il faut écrire au directeur de la basilique,
monsieur Yoland Tremblay, et lui indiquer pourquoi
cet événement nous intéresse en prenant soin d'inclure nos coordonnées
postales. Ensuite, il faut faxer cette demande au numéro suivant :
514-735-4567. On vous répondra par courrier.
Ces deux personnages ont eu une influence
telle sur notre monde qu'on ne peut vraiment pas les ignorer même si leur
pensée en est une des plus rébarbatives. Gobineau a
produit une théorie raciste qui, si elle nous paraît risible aujourd'hui, n'en
était pourtant pas moins très sérieuse à l'époque. Dans ce siècle des
« classifications » où on essayait de comprendre l'univers en
catégorisant tout ce que l'on connaissait, ce penseur, contemporain de Darwin
s'est essayé d'expliquer l'être humain par une hiérarchie des races qui semblait
évidente en comparant les cultures isolées de l'époque. On s'est aperçu depuis
que l'on pouvait programmer n'importe quel être humain de n'importe quel
« software » culturel. Si à l'époque, on pensait que la culture était
causée par le type corporel, aujourd'hui, on sait qu'il n'en est rien. J'en ai
eu la preuve personnelle le jour où j'ai rencontré une jeune asiatique de 20
ans qui, élevée au Québec depuis sa naissance, parlait le joual tout comme moi,
un pure-laine.
Hitler n'est
sûrement pas un philosophe qui inspire la sagesse que l'on recherche généralement
chez un penseur reconnu comme tel. Mais il n'en a pourtant pas moins produit un
système de pensée pour autant. Même si sa pensée nous répugne au plus haut
point, il est peut-être utile de s'y pencher, ne serait-ce que pour pouvoir la
reconnaître lorsqu'elle se présente. Hitler a voulu redresser des torts et
mettre de l'ordre dans le monde. Il a érigé la haine en système pour y arriver.
S'inspirant de Gobineau pour le racisme, de Nietzsche pour
la volonté de puissance, et appuyé d'une
foule de collaborateurs, il a appliqué de façon systématique la coercition, la
violence, le mépris, et la tromperie pour en arriver à ses fins. Il a pourtant
accédé au pouvoir de façon démocratique sans jamais cacher ses réelles
intentions au peuple allemand qui, pour ces raisons, ne peut pas lui rejeter
tout le blâme. Tribun charismatique et démagogue hors pair, il se faisait a
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Certains considèrent la haine comme la plupart des
sceptiques considèrent le doute. Ils l'érigent au niveau du dogme. Ainsi, le
sceptique croit dur comme fer qu'il faut douter de toute croyance sauf de la
sienne.
Et
chacun se croit justifié de haïr les haineux. Quino en avait illustré la dynamique dans Les
gens sont méchants. Mais en quoi sommes-nous concernés, me
direz-vous? En ce soixantième anniversaire de la Libération
des questions reviennent sans cesse. Pourquoi s'en est on pris aux Juifs? N'avait-on
pas des raisons de leur en vouloir? Qui est le véritable coupable de l'Holocauste?
Les officiers ne faisaient-ils pas que leur devoir : obéir aux ordres? Le
comportement des nazis était-il inhumain ou au contraire : que trop humain?
Lisons ce texte : Hitler et le
racisme.
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Un heureux mélange de scepticisme et de stoïcisme, a produit chez
Michel de Montaigne le ferment d'un humanisme qui invite à la réflexion
personnelle. Avec lui, s'augure un penser par soi-même où l'être humain est au
centre de la réflexion. Il veut l'homme libre des contingences
naturelles : la faim, du froid et de la maladie. Ainsi, il défend le
progrès technique. Il veut aussi l'homme libre des autres hommes dans une
société organisée sans lutte et sans privilège de classe où chacun serait égal.
Sa doctrine morale reconnaît à l'humain une valeur suprême et s'oppose au
fanatisme religieux aussi bien qu'à l'étatisme politique qui prétend qu'il faut
sacrifier l'individu au profit de l'ensemble. Ainsi, il invite à la tolérance
nécessaire à la réalisation de ce noble but. Bref, il y a près de 500 ans, ce
philosophe mettait de l'avant des valeurs sociales qui sont aujourd'hui
devenues fondamentales. Je vous invite à lire ces trois
courts extraits de ses Essais.
Écrits dans un ancien français que nous pouvons encore comprendre, il a choisi
de réfléchir à la première personne du singulier. Cette marque de modestie en
fait immédiatement un philosophe sympathique et accessible.
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Dans la série Les grandes questions des philosophes, nous abordons ce mois-ci la quatrième question sur laquelle les philosophes attirent notre attention : Existe-t-il une façon de vivre correcte? Qu'en pensez-vous? Suivez le lien et, en vous inspirant des différentes réponses que vous proposent les philosophes, essayez de m'expliquer votre point de vue...
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Du plaisir de
haïr, William
Hazlitt
Allia © 2005
Hazlitt est un Londonien au regard lucide qui scandalisa ses
compatriotes. Il commence à écrire des essais et à tenir des conférences
philosophiques à l'âge de 25 ans. En 1826,
il écrit ce texte qui n'a pas pris une ride depuis. Jugez en par vous-même :
« La nature, à y regarder de plus près, semble faite d'antipathies :
sans quelque chose à haïr, nous perdrions le ressort même de la pensée et de
l'action. La vie se changerait en une mare stagnante si elle n'était agitée par
les intérêts discordants et les passions déréglées des hommes. [...] Nous sommes incapables
de supporter un état d'indifférence et d'ennui ; l'esprit semble abhorrer
le vide autant que la matière fut jamais supposée le
faire. [...] Le
plaisir de la haine, comme un poison minéral, ronge le cœur de la religion et
la transforme en fiel et en bigoterie ; il fait du patriotisme une excuse
pour aller porter le feu, la peste et la famine dans d'autres pays ; il ne
garde de la vertu que l'esprit de censure et une surveillance étroite, jalouse,
inquisitoriale des actions et des motifs d'autrui. [...] L'amour de la vertu
dénote-t-il le moindre souhait de prendre conscience de nos propres défauts et
de nous en amender? Non, mais il rachète un attachement tenace à nos vices par
une intolérance virulente vis-à-vis des faiblesses humaines. [...] Nous haïssons
nos vieux amis, nous haïssons nos vieux livres, nous haïssons nos vieilles
opinions, et à la fin nous en venons à nous haïr nous-mêmes. [...] »
L'Allemagne nazie,
La haine au pouvoir, Corinne
Maier
Les essentiels Milan #243 © 2004
En
1933, Adolf Hitler prend le pouvoir en Allemagne. Son sort comme l'avenir du
monde en seront bouleversés. Car, avec le nazisme, c'est véritablement la haine
qui gouverne l'Allemagne : la haine des autres peuples, la haine des
Juifs, mais aussi la haine de la démocratie et de la liberté. La main de fer
nazie ravagera tout sur son passage, en Allemagne comme en Europe, rendant
inévitable un conflit mondial, destructeur, dont l'Allemagne sortira finalement
brisée. Comment cela a-t-il pu arriver? Dans quelles circonstances ces années
sombres ont-elles accouché du monde de l'après-guerre? Telles sont les
questions auxquelles cet « Essentiel Milan » donne quelques réponses,
sans prétendre tout dire tant il est difficile de trouver les mots justes pour
parler du nazisme, cet événement central du XXe siècle.
Auschwitz, les nazis
et la « Solution finale », Laurence Rees
Le
27 janvier 1945, l'armée Rouge pénètre dans le camp de concentration
d'Auschwitz et libère les derniers survivants. Le monde découvre un système d'une
barbarie inouïe et jamais vue dans l'histoire de l'humanité : la « Solution
finale », les chambres à gaz et les fours crématoires.
S'appuyant
sur les meilleures sources historiques et sur une centaine d'entretiens inédits
avec d'anciens bourreaux et des rescapés, Laurence Rees
nous permet de comprendre de l'intérieur le
fonctionnement de cette machine à tuer. La force et l'originalité de cette enquête
unique sont de montrer comment les décisions qui ont abouti à la construction
des camps ont mûri des années durant. Et l'on découvre, incrédules,
qu'aujourd'hui encore nombre d'anciens nazis justifient leurs crimes par un
simple et atroce : « Je pensais que c'était une bonne chose. »
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M A G A Z I N E
Saint Augustin, Dossier spécial de 24 pages, Le Magazine Littéraire No.439 de
février 2005
(Extrait
du texte de Laurence Devillairs, page 45)
Pour l'amour de Dieu. Toute la difficulté est de savoir si nous
pouvons aimer véritablement, Dieu, les autres, le Bien. Pour quelles raisons
aimons-nous? Aimons nous uniquement dans l'espoir d'en tirer un bénéfice, dans
un souci de réciprocité, de contre-don? Ou bien sommes-nous
capables d'aimer gratuitement, sans rien espérer en retour? Ce sont les textes
d'Augustin qui nourrissent et motivent ces interrogations. Comment aimer Dieu
alors que rien ne m'assure qu'il m'aime au point de me conférer sa grâce?
Comment aimer Dieu alors que je n'ai aucune garantie qu'il me compte parmi ses
élus? Si je l'aime uniquement avec l'espoir d'être sauvé, la doctrine augustinienne
d'un Dieu qui prédestine gratuitement les uns et réprouve la plupart des autres
tout aussi gratuitement ne pourra que me plonger dans le désespoir et l'inquiétude
Je peux
alors choisir de me compter pour rien, de me haïr pour n'aimer que Dieu. C'est
la position de Pascal, sa mystique, qu'il déclare tenir directement d'Augustin :
« La conversion véritable consiste à s'anéantir devant cet être universel
qu'on a irrité tant de fois et qui peut vous perdre légitimement à toute heure,
à reconnaître qu'on ne peut rien sans lui et qu'on n'a rien mérité de lui que
sa disgrâce » (Pensées, frag.
378). Seule la religion chrétienne enseigne cette salutaire haine de soi ; toute la difficulté est alors
pour Pascal de démontrer la vérité, le génie du christianisme. Je peux aussi
aimer Dieu non pour les biens que j'en attends et le salut que j'en espère mais
pour lui-même, en tant qu'il est Dieu, tout simplement, et quelle que soit sa décision
me concernant. C'est là l'amour désintéressé de Dieu, épuré de l'espérance et
de la crainte d'être sauvé. C'est la mystique de Fénelon, qui, selon lui, est
évidemment la doctrine exacte de saint Augustin : « Si [l'âme] ne
tenait à l'amour de Dieu [...] qu'autant quelle compterait sur sa prédestination,
elle courrait grand risque de se départir [...] de l'amour de Dieu. Ce qui soutient le plus dans l'extrémité de
l'épreuve est de dire [...] " De quelque manière que Dieu ait décidé de
mon sort [...], je ne veux pour rien du monde me départir [...] de son amour".
Voilà dans la pratique ce qui calme l'orage. Voilà ce qui n'introduit nullement
le désespoir, mais qui au contraire en dissipe la tentation [...]. On n'écoute
plus que l'amour, et on aime de plus en plus. » (À Don François Lamy,
juillet 1708.) Aimer sans rien espérer en retour, n'est-ce pas là l'idéal que
nous avons encore de nos jours de l'amour et de l'amitié? Cet idéal est ainsi
le lointain écho de l'augustinisme du XVIIe siècle et des querelles qu'il a suscitées.
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Franquin et la Peine de mort : Il ne faut
pas confondre pâle capitaine et peine capitale
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& & &
Que nous ayons raison ou tort, nous devons
gagner. C'est la seule voie. Et elle est moralement juste et nécessaire. Et
quand nous aurons gagné, qui nous demandera des comptes sur la méthode?
.Adolf Hitler (Citation
No. 203)
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&
Si
vous désirez la sympathie des masses, vous devez leur dire les choses les plus
stupides et les plus crues.
Adolf Hitler (Citation No.126)
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« Philo sans fumée » est le bulletin mensuel de Philo5.com mais c'est aussi
une rencontre
mensuelle organisée le premier vendredi de chaque mois. Vous êtes
cordialement invité à y participer. Pour être invité, écrivez-nous.
Si vous n'habitez pas Montréal et
que nos rencontres vous intéressent, vous pouvez encore nous écrire vos
réflexions. Elles seront communiquées au groupe et viendront enrichir notre
échange. Qu'elle soit épistolaire ou en personne, nous vous remercions de votre
présence.
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