2003-09-20 |
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L'Art d'avoir toujours raison [1] PRÉSENTATION |
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Schopenhauer (1788–1860), philosophe allemand pessimiste, s'intéressait à l'éristique [2], l'art de la controverse. Inspiré principalement de deux oeuvres d'Aristote, Les Topiques et Les Réfutations sophistiques, il produisit ce petit texte publié à titre posthume en 1864. Son originalité est d'analyser, dans la tradition aristotélicienne, une forme de discours très proche de l'usage que nous faisons quotidiennement du langage. Ce type de dialogue met en avant la volonté de s'affirmer, de faire prévaloir ce que l'auteur nomme la « vanité innée » au détriment d'une vision exacte et objective des choses. L'exercice est étranger à toute préoccupation théorique ou philosophique. Ce n'est rien d'autre qu'une rixe verbale où tous les coups sont permis pour réduire en miettes la psychologie de l'adversaire. Bienvenue aux malhonnêtetés intellectuelles, fourberies et mauvaise foi en tout genre. En présence d'interlocuteurs toujours prêts à chercher noise — ceux-là mêmes avec lesquels nous sommes chaque jour confrontés — l'attitude logique n'est pas seulement dérisoire, mais elle est surtout vouée à l'échec. L'exigence de vérité devient alors le cadet des soucis du badaud qui se repaît des coups assénés dans l'arène. Schopenhauer montre le rebours de tout ce que la tradition enseigne. Il ne s'agit plus de trouver le jugement droit par les vertus du logos [3] en s'arrachant progressivement au pathos [4] du discours. Au contraire, inspiré de Machiavel, notre philosophe préconise de s'installer cyniquement dans les positions d'autrui, et d'épouser le mouvement de son raisonnement pour exploiter sa fragilité. Ce rapport de forces est étranger à la dialectique — cet art du dialogue inauguré par Platon, qui analyse par un raisonnement étudié le pour et le contre avant de trancher. On ne tient pas compte de la vérité objective parce qu'on ignore la plupart du temps où elle se trouve. L'éristique est un combat impitoyable qui multiplie les coups et la controverse dont l'issue apporte victoire ou défaite. Les techniques révulsent, mais il importe de les reconnaître lorsque le fourbe présente ses sournoises séductions. |
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[1]
Avoir toujours raison, et... se faire détester de tous. Voir les antidotes : [2] Éristique : Art développé à l'école philosophique de Mégare, petite ville de Grèce vers le Ve et VIe siècle av. J.-C. Éris personnifie la Discorde dans la mythologie grecque. [3] Logos : Terme grec signifiant la raison, le verbe, le principe créateur et rationnel. (9 dictionnaires illustrés) [4] Pathos : Dans les arts et en littérature, qualité de ce qui fait naître la pitié, la tristesse, ou la profonde compassion chez le spectateur ou le lecteur.
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