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Comment vivre ensemble?

par François Brooks

*   Le meilleur des mondes, Aldous Huxley, ©1932

*   1984, George Orwell, ©1949

*   Fahrenheit 451, Ray Bradbury, 1953

*   Un Bonheur insoutenable, Ira Levin, ©1970

*   Écotopie, Ernest Callenbach, 1975

 

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Après avoir vaincu la plupart des maux qui jadis décimaient la population, (épidémies, famines, pauvreté, travail harassant, guerres etc.)[1] le XXe siècle s'est trouvé confronté à l'explosion démographique. De l'an 1900 à l'an 2000, la population mondiale est passée de 1,6 à 6,0 milliards. (Observez la population actuelle de la planète : http://www.ibiblio.org/lunarbin/worldpop. Elle augmente à vue d'œil.)

 

Les cinq livres cités ci-haut tentent d'anticiper ce que pourrait être le monde à venir. Chacun est bien rattaché à son époque : Huxley est un produit de la crise économique de 1929, Orwell est contemporain aux goulags russes, Bradbury, au totalitarisme anti-intellectuel d'après guerre, Levin à la liberté exacerbée de mai 1968 et Callenbach à la naissance de la pensée écologique optimiste des années 70. Bien que quelques gadgets futuristes soient parfois décrits avec prémonition, ces romans s'intéressent moins à l'avenir technologique qu'à notre avenir social. Quand la population augmente et que l'espace dévolu à chacun diminue, comment faire en sorte que la liberté individuelle ne soit pas restreinte? Et comment assurer la cohésion sociale?

 

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Ira Levin privilégie la liberté individuelle envers et contre tout. Il a horreur d'une instance supérieure qui pourrait interférer sur les libertés, même si celle-ci visait le bonheur de chacun. Pour lui, aucun bonheur ne peut se substituer à la liberté.

 

Aldous Huxley donne un point de vue diamétralement opposé. Pour lui, le secret du bonheur et de la liberté, c'est d'aimer ce qu'on est obligé de faire.

 

George Orwell nous dépeint un monde sans liberté où chacune des pensées individuelles est soigneusement contrôlée. Pour ce monde, le bonheur vient d'une confiance aveugle en un Grand Frère (Big Brother) qui, comme le « bon Dieu » le ferait, décide de tout pour le plus grand bien de l'humanité.

 

Ray Bradbury me semble plus proche de notre société actuelle. Dans son roman, le bonheur s'acquiert en renonçant aux questionnements que génère en nous la lecture pour se laisser ballotter dans un univers de spectacles télévisuels et sonores faciles. Le tout est d'accepter ce bien-être sans chercher à le questionner.

 

Ernest Callenbach est le plus optimiste. Il vise le bonheur individuel par une adhésion collective à un comportement écologique en harmonie avec Gaïa, la planète. Il essaie de nous faire comprendre les bénéfices que pourraient apporter ces comportements. Mais le lien entre la macro-écologie (macro-économie) et la micro-écologie (micro-économie) est souvent si peu évident qu'il doit passer par la foi en un système sans argent qui prétend harmoniser les deux.

 

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Ces cinq livres constituent en quelque sorte mon pentateuque de l'anticipation sociale. Il sont une référence que j'utilise constamment dans mon questionnement du comment vivre ensemble. Parce que, loin d'être réglé, le problème de l'explosion démographique n'en est qu'à ses débuts. Et si chaque être à naître est un être qui va certainement mourir, il nous faut penser non seulement à donner à chacun un présent à Noël et à son anniversaire, (je veux dire une vie heureuse) mais aussi une mort humaine. Tiens, constatez par vous-même : pendant que vous lisiez ce texte, 900 personnes sont nées :

http://www.ibiblio.org/lunarbin/worldpop .

 



[1] Oui, je sais, ces problèmes existent encore. Les journaux et le téléjournal nous les rapportent comme s'il n'y avait que ça. Mais, les historiens vous le diront, ces problèmes ne constituent plus, comme par le passé, des régulateurs de population sur lesquels on peut compter. D'ailleurs, la planète grouille de monde tellement que j'ai du mal à comprendre tous les films américains qui ont pour thème la menace de disparition de l'humanité.