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Structuralisme
Aucune évidence immédiate ne permet de comprendre les moeurs des peuples.
La description détaillée de l'individu (approche psychologique)
et l'infinie variété des comportements de groupe (approche sociologique)
montrent une complexité apparemment insurmontable.
L'anthropologie a besoin d'un outil pour décrire l'homme plus simplement pour
échapper au modèle occidental qui ne peut être considéré comme référence universelle lorsqu'on veut étudier les civilisations
éloignées de la nôtre.
En observant l'organisation familiale, les moeurs et les coutumes de diverses peuplades,
on constate les différences d'où se dégage
une structure inconsciente de
comportement que l'on peut retrouver dans toute civilisation.
Le structuralisme anthropologique propose une description plus scientifique des peuples,
dévoile la forme de l'activité de l'esprit humain en général, et explique aussi bien les
comportements individuels que ceux des groupes.
La « structure sociale » se distingue des « relations sociales » en ce sens que la première est le modèle sur lequel
se conforme l'action de la seconde.
« Toute culture peut être considérée comme un ensemble de systèmes symboliques
au premier rang desquels se placent le langage,
les règles matrimoniales, les rapports économiques, l'art, la science, la religion.
Tous ces systèmes visent à exprimer certains aspects
de la réalité physique et de la réalité sociale, et, plus encore, les relations que ces deux types de réalité entretiennent entre eux,
et que les systèmes symboliques eux-mêmes entretiennent les uns avec les
autres. »
Égalité culturelle
La culture occidentale a tendance à se poser comme supérieure, mais elle n'est qu'une modalité d'existence sociale parmi
un ensemble limité de coutumes possibles.
C'est le résultat d'une conception du monde en structure hiérarchique.
La « pensée sauvage »
des peuples « primitifs » ne s'intéresse pas seulement à l'utilitaire,
elle est aussi constituée d'abstraction et de logique ;
mais ces attributs ne se situent pas au même niveau dans leur échelle des valeurs.
Les solutions technologiques ne prouvent pas la supériorité d'un peuple.
Il n'existe pas de civilisation « primitive » ou « évoluée » ;
il n'y a que des solutions différentes à des problèmes fondamentaux identiques.
Chaque culture possède une originalité qui participe de la variété des moeurs humaines.
Quelle que soit la culture, une structure s'érige en système de coutumes dont l'inventaire est limité.
Les sociétés humaines se bornent à choisir parmi un ensemble de coutumes déterminées celles qui constituent leur identité.
Derrière la variété des cultures, il existe une unité psychique de l'humanité.
L'humain ne peut être compris qu'en étudiant les ethnies
les plus éloignées de la nôtre. Pour l'anthropologue, le structuralisme est un outil qui permet de déchiffrer les civilisations. Celles-ci
combinent des éléments de base communs à toute l'humanité, comme elles le font avec les différents sons de la langue. Penser que notre
civilisation est supérieure à une autre ne dit rien sur notre supériorité, mais démontre simplement notre ignorance des autres cultures.
La prohibition de l'inceste comme fondement social
Les relations de parenté constituent une structure qui impose des alliances dont
la prohibition de l'inceste est la clé. Celle-ci est un
« invariant culturel » qui permet à la famille de créer des alliances avec d'autres familles. L'interdiction de marier sa propre
fille ou soeur donne en contrepartie le droit de revendiquer l'échange réciproque des femmes et d'élargir ainsi la tribu. La circulation
des femmes lie différents groupes sociaux et crée la société.
Le cru
Les peuplades qui mangent cru n'ont aucune notion de cru puisqu'elles ne conçoivent pas la cuisson des aliments. Cet usage leur étant inconnu,
elles n'ont donc aucun mot pour parler de ce qu'elles ne conçoivent pas. La réalité ne peut accéder au langage que si elle se pose en contraste
vécu.
Mythes et religion
Le sentiment religieux n'est pas dangereux, mais fondamental. Il correspond à un besoin très profond. C'est un langage
bien construit ; une fois qu'on accepte les fausses prémisses, le système apparaît très cohérent.
L'histoire est à l'Occidental ce que le mythe est au primitif ; elle est une manipulation arbitraire pour inventer une vision globale
de l'univers ; c'est notre mythe à nous.
On retrouve parfois une ressemblance troublante entre les mythes de civilisations éloignées et
les nôtres. Comme nos structures psychiques sont semblables, il est probable qu'ils aient été créés sans aucune communication entre les
cultures.
Mythèmes
Le sémantème est l'élément d'un mot qui en constitue la signification.
Le mythème est au mythe ce que le sémantème est au lexique ; il est l'élément qui donne sens au récit.
L'humain est prisonnier d'un monde absurde : vie/mort, désirs/interdits, bien/mal, aspirations infinies/finitude.
Pour que la vie ait du sens, les cultures produisent des mythes, des récits héroïques.
D'une société à l'autre, les récits varient, mais on retrouve la même structure dont les mythèmes sont les repères sémantiques.
1.
Ordre initial : Vie banale.
— Superman est un modeste employé de bureau ; il pourrait être n'importe qui.
2.
Transgression/Danger : L'hécatombe menace la ville.
— Le héros constate l'imminence de la destruction.
3.
Lutte : Le héros confronte la mort.
— Superman émerge pour manifester la force vitale.
4.
Rédemption : Le héros sort vainqueur.
— Superman anéantit la menace ; il est glorifié.
5.
Renaissance : Le héros est transformé ; il apporte un don.
— Superman a sauvé la ville, et retourne dans l'anonymat ; sa vie a du sens.
Cette structure en cinq mythèmes se retrouve dans tous les mythes de toutes les cultures à toutes les époques.
Elle constitue la forme anthropologique la plus fondamentale.
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