La bureaucratisation, la technique et l'existence des masses renforcent la dépolitisation qui aplanit la voie aux systèmes de domination
totalitaires. Le totalitarisme « atomise » le corps social :
les hommes, segmentés, sont assimilés à une masse anonyme soumise à la domination d'un chef unique et tout-puissant. Il s'agit bien d'une
forme spécifique de pouvoir qui instaure un régime nouveau que l'on ne peut assimiler aux systèmes connus, tels le
despotisme, la tyrannie ou la dictature.
Sous le despotisme, la tyrannie ou la dictature, le dirigeant punit ou tue si vous refusez d'obéir ; si vous coopérez, vous ne risquez
rien. L'individu peut conserver sa liberté de penser sans l'exprimer. On exige seulement qu'il obéisse sans résister.
Mais pour le chef totalitaire, celui qui consent n'a pas plus de valeur que celui qui s'oppose à son idéologie ;
l'un et l'autre seront supprimés, peu importe leurs opinions, si l'État les juge inutiles.
Le totalitarisme est non seulement un régime qui ne supporte aucune opposition, mais aussi
un système qui élimine tout ce qu'il croit inutile à son maintien.
Il arrive qu'un dirigeant doive suspendre les droits temporairement en temps de guerre ou commettre certaines infractions aux lois pour
raison d'État. Mais ces « crimes » sont temporaires, ils ne visent que l'intérêt général et doivent être justifiés.
Le totalitarisme s'installe dans un comportement criminel permanent où les droits des individus comptent pour rien.
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