MATÉRIALISTES 

Aristippe

par Diogène Laërce

Texte fondateur

IIIe s. apr. J.-C.

Ont dit de Diogène Laërce [1]

SOMMAIRE

Sur Aristippe

Sur les cyrénaïques

Sur Aristippe

On raconte qu'un jour, il ordonna à son domestique d'acheter une perdrix cinquante drachmes ; quelqu'un lui en fit reproche ; il répondit : « Vous n'y mettriez sans doute pas une obole ? » L'autre ayant acquiescé : « Une obole et cinquante drachmes, dit-il, c'est pareil pour moi. » Denys, un jour, lui donna à choisir entre trois filles de joie. Il répondit qu'il les emmènerait toutes les trois, « car Pâris lui-même s'était mal trouvé de n'en avoir pris qu'une ». Toutefois, on dit qu'après les avoir menées jusqu'à sa porte, il les renvoya, tant il était enclin aussi bien à prendre qu'à laisser [2].

C'est pourquoi Straton, d'autres disent Platon, lui disait : « Tu es le seul homme capable de porter avec indifférence un riche manteau ou des haillons. » Denys lui ayant craché au visage, il ne s'en irrita pas, et comme on l'en blâmait : « Voyons, dit-il, les pêcheurs, pour prendre un goujon, se laissent bien mouiller par la mer, et moi qui veux prendre une baleine, je ne supporterais pas un crachat ? »

Diogène [3], qui lavait des légumes, le vit passer un jour et le railla ainsi : « Si tu avais appris à manger ces herbes, tu ne fréquenterais pas les cours des tyrans ! » « Et toi, lui répliqua Aristippe, si tu avais appris à vivre en compagnie, tu ne laverais pas tes légumes ! » On lui demandait quel profit il avait retiré de la philosophie : « Celui de pouvoir parler librement à tout le monde. » On lui reprochait de vivre avec trop de mollesse : « Si c'était mal, dit-il, pourquoi le faisait-on lors des fêtes des dieux ! » On lui demandait quel avantage avaient les philosophes : « Si les lois disparaissaient, notre vie n'en serait point changée. [4] » Denys lui demandait un jour pourquoi les philosophes hantaient les maisons des riches, et pourquoi les riches ne hantaient pas celles des philosophes : « C'est, lui dit-il, que les premiers savent ce qui leur manque, et que les autres l'ignorent. » Platon lui ayant reproché sa vie trop molle, il lui demanda s'il croyait Denys homme de bien, et comme Platon en convenait, il lui dit : « Eh bien ! mais Denys vit d'une façon bien plus dissolue, rien ne m'empêche donc de bien vivre de cette façon. » On lui demandait la différence entre les gens savants et les ignorants : « La même qu'entre un cheval dompté et un cheval qui ne l'est pas. » Il entra un jour dans la maison d'une prostituée, et l'un des jeunes gens qui l'accompagnaient se mit à rougir. « Ce n'est pas y entrer, dit-il, qui est honteux, c'est ne pouvoir en sortir [5]. » Quelqu'un lui ayant proposé une énigme à deviner : « Pourquoi voulez-vous, dit-il, sot que vous êtes, que je délie ce qui même lié nous donne du souci ? » Il prétendait qu'il valait mieux être sans le sou que sans savoir, car dans le premier cas, on ne manque que d'argent, dans le second, on manque de ce qui fait l'homme. Un jour où on l'injuriait, il s'en alla, et comme son insulteur lui demandait la raison de sa fuite, il répondit : « Si tu peux dire des injures, moi, je ne puis pas en entendre. » Quelqu'un lui disait qu'il voyait toujours les philosophes aux portes des riches ; il répondit : « Tout comme les médecins sont toujours aux portes des malades, et pourtant il n'en résulte pas que l'on préfère être malade. » Un jour qu'il naviguait vers Corinthe, la tempête s'élevant soudain, comme quelqu'un le raillait et disait : « Nous autres, gens ordinaires, n'avons point peur, et vous, messieurs les philosophes, vous vous affolez ! », il répondit : « La vie à laquelle nous tenons a plus de valeur que la vôtre. » À quelqu'un qui se glorifiait de savoir beaucoup de choses, il répondit : « Ce ne sont pas ceux qui mangent le plus qui sont en bonne santé, mais ceux qui mangent ce qui leur convient, de même les savants ne sont pas ceux qui ont un vaste savoir, mais ceux qui savent les choses utiles [6] ». Un logographe avait plaidé pour lui et gagné son procès. Il demandait à Aristippe après cela : « En quoi vous a servi Socrate ? » Il répondit : « À rendre véridiques les paroles que vous avez dites pour ma défense. »

Il élevait sa fille Arété dans d'excellents principes, l'exerçant à mépriser le superflu. Un père lui demandait un jour quel profit son fils retirerait de l'étude. « À défaut d'autre, dit-il, tout au moins celui-ci, qu'allant au théâtre, il ne sera pas une pierre assise sur une autre pierre. » Une autre fois, il demanda cinquante drachmes à un homme qui voulait lui confier son fils, et comme l'autre protestait, et disait : « Mais pour ce prix, j'achèterais un esclave ! » « Achetez-le donc, lui dit-il, vous en aurez deux. »

[...]

Il fréquentait aussi la fameuse courtisane Laïs (cf. Sotion, Successions, livre II). Aux gens qui l'en blâmaient, il avait coutume de dire : « Je possède Laïs, mais je n'en suis pas possédé [7], et j'ajoute que s'il est beau de vaincre ses passions et de ne pas se laisser dominer par elles, il n'est pas bon de les éteindre tout à fait. » Il ferma la bouche à un homme qui lui reprochait sa gourmandise, en lui disant : « Tu n'achèterais sans doute pas ces bonnes choses pour trois sous ?Bien sûr !Bon, dit-il, eh bien ! je suis moins gourmand que tu n'es avare ! » Simos, l'intendant de Denys, lui montrait un jour de riches appartements et de beaux pavés (c'était un Phrygien sans valeur morale). Notre philosophe lui lança un beau crachat à l'oeil, et comme Simos se mettait en colère : « Il n'y avait pas dans ta maison, dit-il, d'autre endroit où je pusse cracher. »

[...]

On lui demandait comment était mort Socrate : « Comme j'aimerais mourir », dit-il. Un jour, le sophiste Polyxène vint le voir. Aristippe avait des femmes et une table richement servie, et Polyxène lui en fit le reproche. Le philosophe le laissa dire, et soudain : « Ne peux-tu pas, lui demanda-t-il, rester avec nous aujourd'hui ? » Polyxène accepta. « Pourquoi me blâmais-tu, alors, dit Aristippe, ce que tu critiquais, ce me semble, ce n'est pas le festin, mais la dépense. »

[...] Denys lui demandait pourquoi il venait chez lui. « Pour vous faire part de ce que j'ai, et pour recevoir ce que je n'ai pas. » Selon d'autres auteurs, il répondit : « Quand j'avais besoin de sagesse, je suis allé trouver Socrate. Aujourd'hui, j'ai besoin d'argent, je viens vous voir. » Il reprochait aux hommes d'examiner avec soin les objets qu'ils achètent dans les boutiques, et, quand il s'agit des gens, de les juger sur l'apparence. Ce mot est parfois attribué à Diogène.

Une fois, après boire, Denys avait invité chaque convive à mettre une robe de pourpre et à danser. Platon [8] refusa en disant :

Je ne pourrais porter une robe de femme.

Aristippe au contraire la revêtit sans façon, et, se mettant à danser, il dit très finement :

N'est-il pas vrai qu'aux fêtes de Bacchus, une âme sage n'est pas corrompue ?

Il demandait un jour à Denys une faveur pour un ami. Ne l'obtenant pas, il se jeta aux pieds du tyran. On lui en fit reproche. « Ce n'est pas ma faute, dit-il, c'est la faute de Denys : il a les oreilles aux pieds. » [...] Selon lui, les gens instruits dans les arts libéraux, mais ignorant la philosophie, étaient comme les prétendants de Pénélope : ceux-ci ont à leur gré Mélantho, Polydora et les autres servantes, mais ils ne peuvent pas épouser la maîtresse. [...]

[...]

D'Aristippe de Cyrène, on connaît trois livres d'histoire de la Libye, dédiés à Denys, un recueil de vingt-cinq dialogues, en dialecte attique et en dorien, et qui sont : Artabaze, pour les naufragés, pour les exilés, pour le mendiant, pour Laïs, pour Poros, pour Laïs sur son miroir, Erméias, le Songe, pour le président du Banquet, Philomèle, pour les domestiques, pour ceux qui lui reprochent d'avoir acheté du vieux vin et des courtisanes, pour ceux qui lui reprochent de bien banqueter, lettre à sa fille Arété, Pour celui qui s'exerçait aux jeux olympiques, Question, Autre question, Prière à Denys, Prière sur une statue, Sur la fille de Denys, Pour celui qui croyait être déshonoré, Le donneur de conseils. Les uns disent qu'il écrivit six dissertations, Sosicrate de Rhodes dit qu'il n'en écrivit point. Suivant Sotion (livre II) et selon Panétios, il écrivit : De l'Éducation, De la Vertu, le Donneur de Conseils, Artabaze, les Naufragés, les Exilés, six dissertations, trois prières : à Laïs, à Poros, à Socrate, Sur la fortune. Enfin il démontra que le but de la vie est un mouvement doux accompagné de sensation [9].

Sur les cyrénaïques

Maintenant que j'ai écrit la vie d'Aristippe, je vais passer en revue les philosophes cyrénaïques, ses disciples, qui s'appelèrent les uns Hégésiaques, les autres Annicériens, les autres Théodoriens, et aussi les disciples de Phédon, dont les plus illustres sont les Erétriens. Voici la succession de ces philosophes : à Aristippe succédèrent Arété sa fille, Ptolémée d'Éthiopie, Antipatros de Cyrène ; à Arété succédèrent Aristippe le Matrodidacte [10], Théodore, surnommé d'abord l'Athée, puis le Divin ; à Antipatros succédèrent Epiménide de Cyrène, Parébate, Hégésias, qui conseillait le suicide, et Annicéris, qui délivra Platon.

Ceux qui s'en tinrent aux enseignements d'Aristippe et qui prirent le nom de Cyrénaïques professaient les opinions suivantes : « Il y a deux états de l'âme : la douleur et le plaisir ; le plaisir est un mouvement doux et agréable, la douleur un mouvement violent et pénible. Un plaisir ne diffère pas d'un autre plaisir, un plaisir n'est pas plus agréable qu'un autre [11]. Tous les êtres vivants recherchent le plaisir et fuient la douleur. Par plaisir, ils entendent celui du corps, qu'ils prennent pour fin (cf. Panétios, Des Sectes), et non pas le plaisir en repos, consistant dans la privation de la douleur et dans l'absence de trouble, dont Épicure [12] a pris la défense, et qu'il donne comme fin. Ils croient d'autre part que la fin est différente du bonheur : car elle est un plaisir particulier, tandis que le bonheur est un ensemble de plaisirs particuliers, parmi lesquels il faut compter les plaisirs passés et les plaisirs à venir. Ils pensent encore que le plaisir particulier est en soi une vertu et que le bonheur ne l'est pas par soi, mais par les plaisirs particuliers qui le composent. La preuve que la fin est le plaisir est que dès l'enfance et sans aucun raisonnement, nous sommes familiarisés avec lui, que quand nous l'avons obtenu, nous ne désirons plus rien ; au contraire, nous ne fuyons rien comme la douleur, qui est l'opposé du plaisir. Ils pensent encore que le plaisir est un bien, même s'il vient des choses les plus honteuses (cf. Hippobotos, Des Sectes) : l'action peut être honteuse, mais le plaisir que l'on en tire est en soi une vertu et un bien. Quant à l'absence de la douleur, que prône Épicure [13], ils déclarent qu'elle n'est pas un plaisir, pas plus que l'absence de plaisir ne leur paraît une douleur. Tous les deux, en effet, consistent dans le mouvement ; or ni l'absence de douleur ni l'absence de plaisir ne sont des mouvements : être sans douleur, c'est être comme dans l'état d'un homme qui dort. Ils avouent qu'il se peut faire que des gens, par perversion, ne recherchent pas le plaisir. Ils ajoutent que tous les plaisirs et toutes les douleurs de l'âme ne naissent pas d'affections semblables du corps. Voir sa patrie prospère crée en l'homme un plaisir semblable à celui qu'il prend à se savoir heureux. Ils soutiennent encore, au contraire d'Épicure, que le souvenir ou l'attente d'événements heureux ne constitue pas un plaisir, car le temps affaiblit et détruit le mouvement de l'âme. Ils ajoutent même que le plaisir ne vient pas simplement de la vue ou de l'ouïe, puisque nous prenons plaisir à écouter ceux qui imitent des lamentations, et que nous souffrons quand nous en entendons de véritables [14]. Aussi donnent-ils à l'absence de plaisir et de peine le nom d'états intermédiaires. Les plaisirs du corps leur paraissent supérieurs à ceux de l'âme [15], et les souffrances du corps plus pénibles que les peines de l'âme (ne châtie-t-on pas les coupables corporellement ?). Considérant que la douleur est pénible et que le plaisir nous est plus familier, ils recherchaient de préférence le plaisir. De la même façon, bien que le plaisir fût de soi une vertu, ils se refusaient des plaisirs présentant un côté pénible. Ainsi réaliser un ensemble de plaisirs créant le bonheur leur paraissait une tâche délicate. Le sage n'a donc pas une vie tout entière agréable, pas plus que l'ignorant [16] n'a une vie entièrement pénible ; c'est une affaire de proportion ; au reste, il suffit, pour être heureux, d'avoir rencontré un plaisir. La sagesse est un bien, mais elle n'est pas par elle-même une vertu, elle l'est par ses effets. Il faut, disent-ils, avoir un ami pour son utilité, puisque les parties du corps elles-mêmes ne sont agréables que dans la mesure où elles sont utiles. On trouve quelquefois des vertus même chez les fous. Le sport n'est pas inutile à l'acquisition de la vertu. Le sage ne cède ni à l'envie, ni au désir, ni à la superstition, qui proviennent tous d'une illusion. Ces philosophes sont pourtant sensibles au chagrin et à la crainte : ces maux viennent de la nature. La richesse, qui n'est pas de soi une vertu, crée pourtant du plaisir. Selon ces philosophes, on peut saisir la nature des passions, mais non leur origine. Ils ne se souciaient pas de métaphysique, parce que, de toute évidence, on ne peut rien savoir ; par contre, ils étudiaient la logique, science utile. Toutefois, Méléagre (Opinions, liv. II) et Clitomaque (Sectes, liv. I) affirment qu'ils jugeaient ces deux sciences également inutiles. Point n'est besoin en effet de la dialectique pour bien parler, pour éviter la superstition, pour échapper à la crainte de la mort : il suffit de connaître la raison du bien et du mal. D'ailleurs rien n'est par nature, juste, beau, ou laid ; c'est l'usage et la coutume qui en décident. Le philosophe, toutefois, se gardera de commettre un crime, par principe, et non pas par souci des châtiments ou des récompenses établis, mais parce qu'il est sage. Il n'y a pas de progrès. Ces philosophes disent encore que tout le monde n'est pas également sensible à la douleur et que les sens ne donnent pas toujours des sensations justes.

[1] Il ne nous est parvenu aucun écrit original d'Aristippe de Cyrène.
Diogène Laërce a rédigé cette synthèse au IIIe s. apr. J.-C.
Extrait de Vie doctrines et sentences des philosophes illustres TOME 1, GF-Flammarion #56 © 1965, pp. 127-135, traduction, notice et notes par Robert Genaille.

Aristippe vécut vers ~-435-~-356 à Cyrène, colonie grecque sur la côte de l'Afrique. Pays riche pour l'élevage des chevaux (récolte du silphium, plante fourragère), point d'arrivée des caravanes d'Afrique, amenant le sel et l'ivoire. Ce fut de bonne heure une cité luxueuse, de vie facile, touchée par la mollesse orientale, et cette origine a pu avoir une influence sur la vie d'Aristippe.

[2] Ce détachement et cette maîtrise de soi, qui font un côté si séduisant du caractère d'Aristippe, sont loués par Horace, Épîtres, I, i, vers 18-19 : Nunc in Aristippi furtim praecepla relabor,/Et mihi res, non me rébus, subjungere conor (J'en reviens aux principes d'Aristippe, et j'essaye de me soumettre les choses au lieu de leur être soumis).

[3] Cf. vie de Diogène et vie de Théodore.

[4] Toutes ces sentences plus ou moins authentiques, et qui s'accordent assez difficilement avec l'ensemble de la doctrine d'Aristippe, tant elles indiquent une conception élevée de la philosophie, marquent l'influence de Socrate sur son disciple.

[5] Phrase qui se rapporte à ce qui a été dit plus haut du détachement d'Aristippe (ne jamais être esclave de ses passions ni des choses, rester libre). Xénophon, qui s'attaque souvent à Aristippe, montre dans les Mémorables, par un dialogue entre ce philosophe et Socrate, que quiconque recherche le plaisir dépend forcément des hommes et des choses. La conception d'Aristippe fait penser à l'attitude assez voisine qu'aura parfois Montaigne. Cf. Essais, III, 9 : « Moi qui le plus souvent voyage pour mon plaisir, s'il fait laid à droite, je prends à gauche... Ai-je laissé quelque chose à voir derrière moi, j'y retourne, c'est toujours mon chemin... tout m'est un. »

[6] Aristippe soulève ici l'éternel débat entre les partisans d'une instruction intensive, reposant sur la mémoire, et ceux d'une instruction assimilée, reposant sur la réflexion. « Savoir par coeur n'est pas savoir », dit Montaigne.

[7] Le sage ignore donc la passion. La courtisane Laïs avait suivi le philosophe de Corinthe à Athènes. Citons à propos de cette phrase une remarque savoureuse de M. Bénard (La philosophie ancienne) : « Là-dessus, il faudrait interroger la courtisane ! »

[8] Cette opposition entre l'attitude d'Aristippe et celle de Platon chez Denys est reprise au livre III. M. Robin (La pensée grecque, p. 204) estime que « tout ce qu'on a raconté des flagorneries d'Aristippe à l'égard de Denys n'est peut-être que fable destinée à mettre son attitude en contraste avec celle de Platon ».

[9] Cf. Cicéron (de Offic, III, 33) : « Ab Aristippo Cyrenaici atque Annicerii philosophi nominati omne bonum in voluptate posuerunt. »

[10] Élevé par sa mère.

[11] Cette phrase prouve, contrairement à l'opinion vulgaire, qu'Aristippe ne préfère pas les plaisirs des sens. Il aime Laïs, les courtisanes, les bons repas, l'argent, la fréquentation des tyrans, mais il aime également les plaisirs intellectuels et plus délicats, parce que « tous les plaisirs se valent ».

[12] Cf. plus haut : « Le but de la vie est un mouvement doux » (influence d'Héraclite) ; par là il diffère d'Épicure. D. L. y revient au livre X : « Les Cyrénaïques n'admettent pas qu'il y ait du plaisir dans le calme et dans le repos, ils en voient la source dans le mouvement, Épicure au contraire. »

[13] Le plaisir est quelque chose de positif : cf. Cicéron, de Finibus, II, 6.

[14] C'est ce que J.-J. Rousseau (Lettre à d'Alembert sur les spectacles) traduit ainsi : « Si, selon la remarque de Diogène Laërce, le coeur s'attendrit plus volontiers à des maux feints qu'à des maux véritables, si les imitations du théâtre nous arrachent quelquefois plus de pleurs que ne ferait la présence même des objets imités..., c'est parce que ces émotions sont pures et sans mélange d'inquiétude pour nous-mêmes. » L'auteur y transforme la phrase de Diogène Laërce. Il ne s'agit pas de s'attendrir plus à des maux feints qu'à des maux véritables, il s'agit de trouver du plaisir à voir des souffrances sur le théâtre, alors qu'on pleure quand on voit des souffrances réelles.

[15] Cette théorie est encore opposée à celle d'Épicure, cf. liv. X : « Le corps ne souffre que de la douleur présente, l'âme souffre dans le passé, dans le présent et dans l'avenir, les plaisirs de l'âme sont aussi plus intenses. »

[16] Par ignorant, il faut entendre le profane, celui qui n'est pas philosophe.

Philo5
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