961120
par François Brooks
Donner
des cadeaux, ça m'a toujours un peu embarrassé. D'abord, j'ai peur que mon
récipiendaire se sente mal à l'aise de devenir mon obligé. Ensuite, j'ai
souvent investi des fortunes d'ingéniosité et de recherche en temps pour
trouver un cadeau qui n'est pas apprécié. Aussi, ça me coûte parfois beaucoup
d'argent puisque je donne souvent ce que je voudrais recevoir. Et comme je me
dis à chaque fois que, “Charité bien ordonnée...” ou “On ne peut donner que ce
que l'on a.” , j'achète alors le cadeau en double : un pour moi et un pour
donner.
Mais cette année, j'ai décidé d'être
simplement “mesquin” avec mes enfants et les cousins : Chacun recevra une
enveloppe qui contiendra un montant suffisant (égal pour tous avec une légère
plus-value à mes enfants) à leur mettre un sourire dans le visage pour le temps
que durera leur visite chez-moi.
Et du coup, j'ai l'impression de leur
faire le cadeau le plus approprié : Une pierre deux coups. D'abord j'esquive
les interminables recherches “du” cadeau approprié à chacun et de l'équilibre
des coûts (la foutue justice). Ensuite j'évite les fastidieux emballages qui
me prennent à chaque fois une journée
complète quand ce n'est pas plus. Et, pour eux, je leur donne ce qui est le
plus rare dans toute économie : de l'argent ; ils auront l'illusion que je ne
m'immisce pas dans leurs désirs privés et que je leur laisse la liberté du
choix du cadeau.
Après tout, je veux bien recevoir mes
enfants, les cousins et ma famille mais ils ne se manifestent que rarement. Je
pense quand même qu'ils viendraient me voir une fois l'an, même si je ne leur
faisais pas de cadeau. Mais si je dois les voir, je préfère qu'ils ne viennent
pas avec leur humeur fortuite du moment. Et puisque j'en ai le pouvoir, aussi
bien leur aider les endorphines avec un petit cadeau.
Non pas que je n'aime pas
mes enfants ou les cousins, ou même mes frères, mais je me sens si peu
d'affinités avec eux : nos rencontres m'apparaissent presque mondaines. Nos
intérêts sont souvent opposés et une sorte de solitude s'en suit.