990816
par François Brooks
Bonjour, madame Lefebvre.
J'ai vu, il y a quelques semaines, le
reportage qu'on a fait sur vous à l'émission Second regard et votre témoignage
a attiré mon attention. Vous y avez utilisé le mot sens à quelques
reprises et je me suis senti en accord avec ce que vous disiez. Si la foi doit
être porteuse de sens, elle doit être d'une grande utilité. Mais les
institutions qui la véhiculent ne vont-elles pas parfois à l'encontre de la
foi. Aussi, j'ai une question à vous poser à cet effet mais, avant,
permettez-moi de me présenter.
J'ai 44 ans et mon père
avait laissé la prêtrise juste avant de faire ses vœux pour se marier. (Il est
décédé tout juste avant ma naissance). Ma mère nous a élevés dans la foi et,
comme tout bon bébé boomer, dès l'adolescence, j'ai eu une ‘indigestion' de
catholicisme et j'ai abandonné toute pratique religieuse.
Lorsque, il y a 4 ans, je terminais mon
DEC, les questions de la foi se sont mises à m'intéresser par le biais des
philosophes. J'ai voulu approfondir cet intérêt animé de la certitude que si
René Descartes lui-même était croyant, ça valait la peine que j'essaie au moins
de comprendre pourquoi. J'ai lu tout ce que j'ai pu trouver sur les philosophes
(86 philosophes) en portant une attention spéciale sur leur rapport avec la
foi. J'ai aussi inclus dans mon intérêt ceux qui étaient athées puisque
j'estime que nier l'existence de Dieu est encore une façon de lui donner une
place dans notre pensée. Je pense pouvoir affirmer maintenant que j'ai trouvé
une forme de foi qui est en accord avec ma pensée, mais...
Il
y a 20 ans, j'ai lu la bible d'un couvert à l'autre. Récemment, comme pour
essayer de m'y remettre, je suis tombé sur un opuscule intitulé Quarante
mots clés pour entrer dans la Bible.
Voici ma question pour vous :
Pourquoi la religion chrétienne, qui se
veut rationnelle lorsqu'elle appuie son enseignement sur des lieux historiques,
des dates relativement précises, des faits politiques, historiques etc. ,
pourquoi, à l'opposé, introduit-elle des dogmes de foi qui sont en
quelque sorte une insulte à l'intelligence.
Je donnerai pour exemples une vierge
qui enfante, un mort qui ressuscite, de l'eau changée en vin, une vie éternelle
après la mort etc.
Pourquoi faut-il que la foi chrétienne
s'ancre dans des artifices fabuleux? Ne nuit-elle pas à ses propres objectifs
de propagation en ajoutant à son message une partie fantastique peu crédible?
L'homme serein, intelligent et bien intentionné ne peut-il pas entretenir une
foi en accord avec sa rationalité sans devoir être troublé par de telles
absurdités?
J'espère que vous aurez quelques minutes
pour me répondre et alimenter ma réflexion. J'aimerais en faire la base d'une
nouvelle démarche dans mes recherches. En effet, je serais intéressé à suivre
un cours en Théologie comme auditeur libre. (Auriez-vous quelques suggestions
pour moi?)
François Brooks
* * *
990816
Monsieur Brooks,
Vos questions sont pertinentes. Elles offrent un tremplin de
questionnement pour suivre quelques cours de théologie. Vous exprimez les
ambivalences de tous les modernes, à l'égard du rapport entre modernité et foi.
Par ailleurs, les religions ne fondent paradoxalement pas leurs croyances
uniquement sur des faits. Ce type d'argumentation est justement un fruit de la
modernité rationnelle. Quant au dogmatisme, la théologie contemporaine le vise
dans ses critiques fondamentales. Cf Claude Geffé, Le christianisme au risque
de l'interprétation, Paris, Cerf.<
Bien à vous
Solange Lefebvre
P.S. Quant aux cours de
théologie, adressez-vous au secrétariat d'une faculté non loin de chez vous.
Regardez la banque de cours, les options, consultez, soumettez votre dossier.
Vous finirez bien par trouver ce qui vous convient.