980317
par François Brooks
L'activité sexuelle, lorsque l'action bat
son plein, a ceci de troublant qu'elle pourrait facilement, à première vue,
être confondue avec une lutte. Pendant la chevauchée endiablée de la
copulation, tout porte à croire que je suis en train de maltraiter, voire de
violer, ma partenaire de lit. Ses longues plaintes répétées, son front
courroucé, sa tête qui dodeline, sa respiration haletante, ses contractions
musculaires spasmodiques et mes grognements de bête, tout porte à croire que je
suis en train de la battre, de la tourmenter, de la faire souffrir. On pourrait
même penser que j'effectue sur elle le travail du bourreau en train de torturer
sa victime.
C'est d'autant plus troublant que ces
signes de souffrance augmentent mon excitation dans la même mesure qu'ils
s'accroissent. Un seul indice me dit que ma blonde n'est pas en train de
souffrir : c'est qu'elle accepte de rester là, avec moi. Si elle
souffrait, elle s'en irait sur-le-champ, je suppose, pour se soustraire à mon
agression. Autrement, je croirais être véritablement en train de la violer. Ça
me fait bizarre de penser que ces manifestations de jouissance, pendant
l'amour, en tout point semblables à des manifestations de souffrance,
m'excitent au plus haut point, alors que l'idée même du viol me fait débander.
Voilà sans doute pourquoi
on s'isole pour baiser ; les gémissements d'une femme ne peuvent pas
laisser indifférent. Le tout est de savoir interpréter la nuance entre
jouissance et souffrance.