980306
par François Brooks
Dieu
créé le monde à partir du néant [1].
Lorsqu'on regarde à
travers la fenêtre, on voit une autre maison en face. L'intérieur de ma maison
est comme l'intérieur de moi-même. Ma conscience dans mon corps est comparable
à mon corps présent dans la maison. La maison en face, c'est l'autre que je
vois et qui contient une âme, une conscience, une présence à l'intérieur de son
corps, sa maison. Cette conscience, comme les poupées russes, en contient une
autre qui en contient une autre et ainsi de suite. La plus intérieure de toutes
les poupées pourrait se comparer à Dieu, mais cette « poupée » est si
petite, si intérieure, qu'à mon échelle, elle est comparable au néant. Et
pourtant, ce néant est la forme parfaite qui donne sa forme à toutes les autres
couches extérieures. Ce néant, c'est Dieu, c'est la base de l'être, c'est le
vide qui rend possible l'être construit à partir de la présence des êtres et
des choses extérieures.
Si je rentre dans les trous noirs des
yeux de celui qui m'observe, c'est comme si mon image pénétrait dans le vide de
ses yeux. Ce vide que je remplis de mon image anime son être[2] ainsi que toutes les images qui ont
pénétré dans le vide de ses yeux (son vide intérieur) depuis sa naissance.
Toutes ces images l'ont fait devenir ce qu'il est, lui ont donné son existence
propre.
Je vois le monde comme
rempli de gens vides, avides de rencontrer d'autres vides pour combler leur
intérieur. C'est comme si Dieu, néant intérieur, se cherchait lui-même dans les
êtres qu'il habite. Une vaste quête narcissique du néant envers lui-même, voilà
Dieu et le monde ; voilà l'Être.